Tag Archives: Freinet

Freinet, Montessori, Steiner : ces écoles qui changent la vie des élèves et des profs

Par NOLWENN WEILER 12 NOVEMBRE 2012

http://www.bastamag.net/Freinet-Montessori-Steiner-ces

Développer son autonomie et son esprit critique, apprendre à apprendre : c’est le credo des écoles alternatives. En France, 20 000 élèves expérimentent les pédagogies alternatives – Freinet, Montessori ou Steiner – dans une centaine d’établissements. Des méthodes d’apprentissage qui ont fait leurs preuves depuis plus d’un siècle, mais peinent à se diffuser dans l’Éducation Nationale. Vincent Peillon saura-t-il s’en inspirer pour son projet de refondation de l’école ? Petit tour d’horizon de ces pédagogies qui pourraient ré-enchanter l’école.

Extraits:

  • Dans la classe de Nina, enseignante à l’école Steiner de Vern-sur-Seiche [1], au sud de Rennes, il n’y a pas de notes, ni d’évaluation. « Quand on fait une dictée, on la corrige ensemble. Cela m’est égal de leur mettre une note ensuite, explique l’institutrice. Que vont-ils apprendre de plus ? Ils découvrent en corrigeant ce qu’ils peuvent améliorer. Cela leur donne confiance en eux. » Ici, pas de tension ni de compétition liées aux notes. Pas de pression. Juste le plaisir d’apprendre et de progresser.
  • « Les notes organisent le bonheur de quelques élèves et le malheur de beaucoup d’autres, et c’est tout », résume, lapidaire, Jean-Jacques Hazan, président de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) et défenseur convaincu des méthodes d’apprentissage « alternatives ». « Il faut transformer ce qui se passe en classe, en finir avec cette relation frontale entre élèves et enseignants.
  • …on apprend mieux en faisant qu’en écoutant.
  • L’apprentissage de la confiance en soi est aussi un principe fort de cette pédagogie.
  • À l’école Freinet, les enfants travaillent aussi beaucoup sur la coopération. Ils sont dans des classes multi-niveaux, installés par petits groupes, au sein desquels les grands aident les petits. « Les enfants se font réciter mutuellement. L’absence totale d’esprit de compétition est un vrai confort », raconte Marianne.
  • L’adulte est un « accompagnant », qui doit créer un environnement permettant à l’enfant de développer ses potentiels. Et lui laisser le temps de faire les choses lui-même. Maria Montessori a créé du matériel pédagogique pour favoriser cet « auto-apprentissage » de l’enfant.
  • « En proposant une autre façon d’apprendre, qui permette aux enfants de développer leur esprit critique et d’agir collectivement, Freinet avait comme idée d’émanciper les classes populaires. »
  • « Les devoirs ne servent à rien d’autre qu’à abrutir les mômes et se fâcher avec eux tous les soirs »
  • Les parents doivent aussi trouver leur place dans l’école.
  • Pire : la France est aujourd’hui l’un des pays où les inégalités sociales pèsent le plus dans la réussite scolaire.

Intermède : Les invariants pédagogiques de Freinet, 1964

En 1964, deux ans avant sa mort, Freinet rédige les « invariants pédagogiques». « C’est une nouvelle gamme des valeurs scolaires que nous voudrions ici nous appliquer à établir, sans autre parti pris que nos préoccupations de recherche de la vérité, à la lumière de l’expérience et du bon sens. Sur la base de ces principes que nous tiendrons pour invariants, donc inattaquables et sûrs, nous voudrions réaliser une sorte de Code pédagogique… »

  • Invariant no 1 : L’enfant est de la même nature que nous.
  • No 2 : Être plus grand ne signifie pas forcément être au-dessus des autres.
  • No 3 : Le comportement scolaire d’un enfant est fonction de son état physiologique, organique et constitutionnel.
  • No 4 : Nul – l’enfant pas plus que l’adulte – n’aime être commandé d’autorité.
  • No 5 : Nul n’aime s’aligner, parce que s’aligner, c’est obéir passivement à un ordre extérieur.
  • No 6 : Nul n’aime se voir contraint à faire un certain travail, même si ce travail ne lui déplaît pas particulièrement. C’est la contrainte qui est paralysante.
  • No 7 : Chacun aime choisir son travail, même si ce choix n’est pas avantageux.
  • No 8 : Nul n’aime tourner à vide, agir en robot, c’est-à-dire faire des actes, se plier à des pensées qui sont inscrites dans des mécaniques auxquelles il ne participe pas.
  • No 9 : Il nous faut motiver le travail.
  • No 10 : Plus de scolastique.
  • Invariant 10 bis : Tout individu veut réussir. L’échec est inhibiteur, destructeur de l’allant et de l’enthousiasme.
  • Invariant 10 ter : Ce n’est pas le jeu qui est naturel à l’enfant, mais le travail.
  • No 11 : La voie normale de l’acquisition n’est nullement l’observation, l’explication et la démonstration, processus essentiel de l’École, mais le tâtonnement expérimental, démarche naturelle et universelle.
  • No 12 : La mémoire, dont l’École fait tant de cas, n’est valable et précieuse que lorsqu’elle est vraiment au service de la vie.
  • No 13 : Les acquisitions ne se font pas comme l’on croit parfois, par l’étude des règles et des lois, mais par l’expérience. Étudier d’abord ces règles et ces lois, en français, en art, en mathématiques, en sciences, c’est placer la charrue devant les bœufs.
  • No 14 : L’intelligence n’est pas, comme l’enseigne la scolastique, une faculté spécifique fonctionnant comme en circuit fermé, indépendamment des autres éléments vitaux de l’individu.
  • No 15 : L’École ne cultive qu’une forme abstraite d’intelligence, qui agit, hors de la réalité vivante, par le truchement de mots et d’idées fixées par la mémoire.
  • No 16 : L’enfant n’aime pas écouter une leçon ex cathedra.
  • No 17 : L’enfant ne se fatigue pas à faire un travail qui est dans la ligne de sa vie, qui lui est pour ainsi dire fonctionnel.
  • No 18 : Personne, ni enfant ni adulte, n’aime le contrôle et la sanction qui sont toujours considérés comme une atteinte à sa dignité, surtout lorsqu’ils s’exercent en public.
  • No 19 : Les notes et les classements sont toujours une erreur.
  • No 20 : Parlez le moins possible.
  • No 21 : L’enfant n’aime pas le travail de troupeau auquel l’individu doit se plier comme un robot. Il aime le travail individuel ou le travail d’équipe au sein d’une communauté coopérative.
  • No 22 : L’ordre et la discipline sont nécessaires en classe.
  • No 23 : Les punitions sont toujours une erreur. Elles sont humiliantes pour tous et n’aboutissent jamais au but recherché. Elles sont tout au plus un pis-aller.
  • No 24 : La vie nouvelle de l’École suppose la coopération scolaire, c’est-à-dire la gestion par les usagers, l’éducateur compris, de la vie et du travail scolaire.
  • No 25 : La surcharge des classes est toujours une erreur pédagogique.
  • No 26 : La conception actuelle des grands ensembles scolaires aboutit à l’anonymat des maîtres et des élèves; elle est, de ce fait, toujours une erreur et une entrave.
  • No 27 : On prépare la démocratie de demain par la démocratie à l’École. Un régime autoritaire à l’École ne saurait être formateur de citoyens démocrates.
  • No 28 : On ne peut éduquer que dans la dignité. Respecter les enfants, ceux-ci devant respecter leurs maîtres est une des premières conditions de la rénovation de l’École.
  • No 29 : L’opposition de la réaction pédagogique, élément de la réaction sociale et politique est aussi un invariant. avec lequel nous aurons, hélas! à compter sans que nous puissions nous-mêmes l’éviter ou le corriger.
  • No 30 : Il y a un invariant aussi qui justifie tous nos tâtonnements et authentifie notre action : c’est l’optimiste espoir en la vie.